Francontraste 2023

Section Études littéraires

Recueil des résumés

623 KB

KONAN Alex Abegou
Université Félix Houphouët-Boigny, Abidjan, Côte d’Ivoire

Osmose linguistique dans le roman ivoirien cas de L’itinérant de Tiburce Koffi

En lisant les œuvres écrites de la littérature ivoirienne moderne, une remarque s’impose, celle qui consacre un essor considérable du point de vue auctoriale, générique et thématique. En effet, quatre-vingt-dix années après Les villes, cette littérature n’a de cesse enregistré des auteurs qui se sont succédés par vague générationnelle et des ramifications thématiques qui charrient dans leurs majeures parties les événements ou histoire récente qui minent la cité. De plus, on note la flexibilité stylistique qui souligne sa spécifié et son identité. Si la production littéraire ivoirienne s’est tournée vers une écriture autobiographique par sa première génération, la seconde quant à elle s’est attelée à être le miroir de la société. Un miroir fortement tourné vers la critique du néocolonialisme : critique sociale et politique. Mais la troisième tendance de ces écrivains s’inscrit dans une veine de littérature nationale où les auteurs se veulent patriotes en assemblant les items culturels et linguistiques pour tisser un mode d’écriture esthétique. La syntaxe adoptée est un entremêlement d’emprunt ethnique et du bilinguisme. Parmi les genres qui orchestrent cet esthétisme pluridimensionnel des auteurs comme Tiburce Koffi ont fait surfer leur lectorat sur un jeu d’osmose linguistique, un vas-et-viens entre le Baoulé traditionnel et les langues internationales à travers son roman L’Itinérant. En gros, l’idée de cette communication est de montrer le réseau esthétique qui permet de lire cet entremêlement linguistique perçu dans le corpus. En d’autres termes, elle tentera de répondre aux interrogations suivantes : comment l’osmose linguistique se lie-t-elle dans l’œuvre ? N’est-ce pas pour l’auteur une technique de vendre sa culture, sa langue maternelle à travers ce style qui s’ancre dans le fin Bossonisme.

Mots-clés : littérature ivoirienne, osmose linguistiques, Baoulé, Tiburce Koffi.

KOŠČEC Marinko
Faculté de philosophie et lettres, Université de Zagreb

La temporalité et l’instance narrative dans Les années d’Annie Ernaux

Nous proposons d’étudier la conjonction d’une approche originale à la dimension temporelle et une perspective narrative particulière, qui dans Les années aboutissent à un roman à mi-chemin entre autobiographie et étude sociologique. Si les livres précédents d’Annie Ernaux sont marqués par l’impudeur et un discours violent, ainsi que centrés sur un personnage bien distinct, celui-ci est un récit factuel et minimaliste au niveau de l’expression et de l’autre part englobant et panoramique parce qu’il est raconté d’un point de vue collectif. Notre étude cherche à démontrer les procédés que l’auteure utilise pour incarner la singularité subjective tout en restant « dans la ligne des faits historiques, du document ». En d’autres termes, comment elle parvient à la fois à plonger dans l’intimité et saisir les éléments principaux de l’évolution sociale ; à représenter le passage vertigineux du temps et à le suspendre en grossissant des détails sélectionnés de l’existence quotidienne.

Mots-clés : Ernaux, roman, temporalité, instance narrative, mémoire

LEVAČIĆ Patrik
Université de Zadar

Image et concept du Harem dans les récits de voyage français

D’après Gustave Flaubert « l’orientaliste est un homme qui a beaucoup voyagé ». Qu’est-ce qui peut le mieux résumer l’Orient qu’un Harem ? Dans l’imaginaire occidental, il représente un espace féérique, un fantasme de polygamie. Le fantasme sous-entend l’impossibilité d’accès, ce qui fait appel aux topos littéraires d’un Autre Monde. De l’autre côté, dans les récits de voyages au féminin, le Harem représente un drame entre le pouvoir de l’homme et la liberté de la femme, ce qui provoque sa résistance et sa lutte pour ses droits. Nous allons suivre l’évolution de l’image du Harem depuis le 16ème siècle pour l’appliquer sur les voyages que nous considérons comme essentiels : 1. Gérard de Nerval : Voyage en Orient (1851) et 2. Olympe Audouard : Les Mystères du Sérail et des Harems Turcs (1863). « Toutes les femmes européennes qui ont pénétré dans les harems s’accordent à vanter le bonheur des femmes musulmanes. » Cette constatation de Gérard de Nerval, dans son récit mentionné ci-haut, est basée sur une étude de Lady Morgan (Woman and her Master, 1840), qui a écrit : « Je suis persuadée que les femmes seules sont libres en Turquie ». Le Harem évoque plusieurs confrontations : Orient-Occident, Islam-Christianisme, homme-femme, Imaginaire-Réel. L’objectif de cette communication est de mettre en lumière comment l’image de Harem a évolué dans les récits de voyages pour en ressortir les ambiguïtés, et puis, d’élaborer son concept qui s’en échappe en permanence.

Mots-clés : récits de voyages, Orient, Harem

REVUTSKAYA Alena
Faculté des langues romanes, Université Linguistique de Minsk, Biélorussie

De la ville médiévale à la ville ouverte :
les adresses de Romain Gary à Vilnius

L’étude de l’espace urbain en tant que texte ne date pas d’hier. De la sémiologie urbaine de Barthes aux travaux de Youri Lotman (Lotman 1984) et de Vladimir Toporov (Toporov 2003), en passant par la ville-texte de Michel Butor (Butor 1982), la lecture de la ville fait partie des études littéraires. Notre communication examine plusieurs éléments de Vilnius liés à Romain Gary, aussi bien que leur image dans l’univers autofictif de La Promesse de l’aube (1960). Notre démarche met en parallèle la dynamique d’une ville plurilingue et l’ambition du futur écrivain-aviateur. Cependant, notre intérêt tient moins au rapport problématique de Gary à ses origines qu’à la complexité de l’histoire de Vilnius, dont le texte se lit dans plusieurs langues. Ainsi, le XXe siècle renonce à la domination idéologique du centre-ville (on se souvient notamment des romans de Georges Rodenbach, nostalgique du centre, espace clos synonyme de la sécurité). C’est d’ailleurs encore la révolution industrielle qui modifie le paysage urbain et remet en question l’importance du centre. Ce changement, selon notre hypothèse, se traduit chez Gary par une quête identitaire. En effet, Paris étant la ville de rêve pour sa mère, c’est pourtant bien à Vilnius (Vilna au moment de sa naissance et Wilno à partir de 1920) que le rêve de Gary puise ses origines. En mettant en corrélation éléments urbains particuliers et faits discursifs, nous découvrons que l’ambition du futur écrivain répond à la dynamique de la ville qui rompt avec l’isolement médiéval, revient à l’état chaotique et dépasse ses propres frontières. De même, dans La Promesse de l’aube, le rêve du petit Roman ne se réalise que dans le mouvement, inscrit dans l’histoire de sa ville natale. Enfin, le narrateur, tout comme la ville, se construit dans une pluralité identitaire.

Mots-clés : Romain Gary, Vilnius, centre-ville, La Promesse de l’aube, quête identitaire