VITEZ Primož
Université de Ljubljana, Slovénie
Aspects textuels de la prière :
le Notre Père et ses retraductions
La prière formalisée, en tant qu’unité textuelle, est originairement un acte de parole dont la codification écrite régit l’usage oral (Beaugrande et Dressler, 1992). Le statut textuel particulier est engendré par le fait que la prière n’a de sens pragmatique que lorsque son énonciation se perpétue quotidiennement dans la pratique religieuse du locuteur. Par cet aspect itératif, le sens de la prière est optimal quand le texte reste stable, c’est-à-dire intouché. Néanmoins, l’histoire des retraductions françaises du Notre Père, prière chrétienne la plus ancienne, déploie une multitude de variantes textuelles dont les intentions ont toujours oscillé entre deux nécessités : celle de préciser le sens du texte et celle d’assurer sa stabilité synchronique. En 2017, le texte du Notre Père s’est retrouvé dans une situation singulière, parce que l’Église catholique francophone a mis en oeuvre une modification officielle de la sixième demande pour préciser le sens du verset « ne nous soumets pas à la tentation » en le reformulant par « ne nous laisse pas entrer en tentation ». Cette retraduction est produite par une réflexion théologique du contenu de la demande. Le verset réinterprété apporte un changement prescrit à l’usage de la prière en imposant cette correction réfléchie du contenu sémantique à la pratique quotidienne du texte sacré.
Mots clés : analyse textuelle, le Notre Père, prière, traduction des textes sacrés, retraduction