SAUCEY Médéric
IPC-Facultés Libres de Philosophie et de Psychologie, Paris
L’étonnement comme daimôn
“Au commencement était le Verbe […] et le Verbe était Dieu” (Jn 1, 1). Vidée de son contenu christologique, cette expression permet de manifester une forme déficiente de l’acte d’enseignement. Le « Verbe » pris au sens d’un contenu rationnel à transmettre serait la mesure absolue dans l’acte didactique (jouant en ce sens le rôle épistémique d’un « dieu »). En sens contraire, Molière affirme : « mon âme et mon corps marchent de compagnie » (Les Femmes savantes, acte IV, scène 2). Molière se fait ici le chantre du sens commun avant même que Thomas Reid théorise cette philosophie (Recherche sur l’entendement humain d’après les principes du sens commun). Cet appétit de connaître qui vient des tripes autant que de l’intellect s’incarne dans l’étonnement qui ose le pourquoi. Pourtant si cet appétit apparaît autant naturel que principiel (Aristote, Métaphysique, 982 b11), Descartes (Passions de l’âme, art. 76) comme Rabelais (Pantagruel, p. 157) ont manifesté l’importance d’éduquer cet appétit. A partir d’une lecture comparée de la Poétique d’Aristote et de l’œuvre de Rabelais, nous manifesterons que cet acte d’éducation appartient en propre à la littérature. Appliquant le fruit de notre étude à l’étonnement, nous pourrons affirmer d’une manière plus socratique : « Au commencement était l’étonnement, et l’étonnement était le daimôn ».
Mots-clés : Aristote, Etonnement, Rabelais