ĆURKO Daniela
Université de Zadar
L’identité, la mémoire et le trauma dans L’amour,
la fantasia et dans Nulle part dans la maison de mon père d’Assia Djebar
L’intervention étudie le rôle du trauma et de son lien avec l’identité et la mémoire dans les deux œuvres citées de Djebar. Nous étudierons d’abord la fonction constituante du trauma dans l’identité nationale dans le premier roman, puisque pour Djebar, son identité culturelle englobe et conditionne son identité personnelle de femme, de l’amante et de l’écrivain, et la partie essentielle de l’identité nationale est la grande blessure de la colonisation française, qui commence par la prise de la ville et du port d’Alger en 1830, narrée au moyen de la métaphore filée du viol. Dans son autobiographie Nulle part dans la maison de mon père, Djebar insiste sur l’importance du trauma personnel sur la genèse de son œuvre littéraire, exprimant l’idée que toute son œuvre littéraire ayant précédé l’écriture de l’autobiographie était une tentative de s’expliquer à soi-même un événement pourtant jamais thématisé comme sujet de ses œuvres – sa tentative de suicide, faite vers la fin de son adolescence. La narratrice, double de Djebar, essaie de comprendre les raisons de ce silence pourtant si fécond en paroles, de si mutisme qui, d’après elle, serait à l’origine de son métier et donc de son identité de l’écrivaine. Ainsi, pose-t-elle la question de l’enchevêtrement de la mémoire, de l’oubli – en tant que refoulement freudien-, de la sublimation et de l’identité personnelle. Elle se demande aussi si son identité de l’écrivain ne serait paradoxalement due à l’acculturation (cf. les travaux du sociologue Hervé Marchal), vu le tabou de l’écriture du soi dans la culture arabe.
Mots-clés : Assia Djebar, identité, mémoire, oubli, l’interdit, sublimation, l’acculturation