BEN SAAD Nizar
Université de Sousse, Tunisie
La Virtù, une énergie morale et citoyenne
À propos du concept de virtù, l’on s’appliquera à démontrer l’apport incontestable de Machiavel et sa place relative dans l’histoire des idées. L’auteur du Prince a contribué, d’un point de vue épistémologique, à l’étendue et à la vitalité de ce champ notionnel. Le terme a évolué au cours de l’Histoire et l’on peut s’en rendre compte en relisant la définition du terme dans l’Encyclopédie de Diderot. Le conatus de Spinoza est directement inspiré de la virtù de Machiavel. Au XVIIIe siècle, des écrivains politiques comme Montesquieu et Rousseau associent la virtù à l’énergie citoyenne. Ce concept est d’autant plus opératoire lorsqu’il s’agit de désacraliser l’autorité de l’Eglise catholique, et la vertu chrétienne considérée comme efféminée. La vertu tient une place privilégiée dans la perception genrée de la sensibilité des hommes et des femmes au XVIIIe siècle, étroitement liée à la sentimentalité, aux égarements du cœur, aux larmes, aux soupirs qui s’étalent dans un grand nombre de romans, particulièrement chez des auteures femmes comme Mme de Tencin ou Mme de Riccoboni. La virtù « machiavelienne » s’oppose également à la vertu des moralistes, trop préoccupés de droiture, de sagesse et d’honneur. A la fin du siècle, le libertinage triomphe avec le marquis de Sade qui se montre résolu à tout examiner, à tout remuer, pour que le vice triomphe et que la vertu soit à jamais persécutée, en témoignent les histoires de Justine et de sa sœur Juliette. La vertu se définit chez Marx comme une praxis, incontournable dans l’accélération du processus historique.
Mots-clés : Virtù, énergie, volonté, progrès