Section Sciences du langage

 

Recueil des résumés Pdf Pdf ( 943KB )

 

Aradi Csenge Eszter,
Université de Szeged, Hongrie

« La métaphore conceptuelle dans le discours moralisateur sur l’amour-propre au dix-septième siècle – Pascal et La Rochefoucauld »

L’évolution des méthodes de recherche dans la linguistique cognitive nous a offert une perspective nouvelle sur l’analyse de discours : la Théorie de la Métaphore Conceptuelle (TMC), élaborée par George Lakoff et Mark Johnson en 1980, rend possible une analyse interdisciplinaire du texte au niveau langagier, discursif et culturel. Cela veut dire que la TCM a le potentiel de fournir une interprétation profonde et complexe, tenant en compte tous les aspects du texte analysé.

Dans ma communication, je me propose d’identifier, d’analyser et en même temps d’interpréter les métaphores conceptuelles de l’amour-propre dans le discours moralisateur du dix-septième siècle, plus précisément, dans les Pensées de Blaise Pascal et les Maximes de La Rochefoucauld. Aux yeux des moralistes adeptes de la théologie augustinienne, y compris surtout les jansénistes de Port-Royal, l’amour-propre était synonyme de la vanité et de la concupiscence qui détourne l’homme de l’amour de Dieu. Dans l’argumentation de Pascal et de La Rochefoucauld, la critique de l’amour-propre occupe une place éminente et il s’y manifeste par un emploi riche et divers de procédés de métaphorisation. L’objectif principal de la recherche est d’identifier ces procédés de métaphorisation, d’analyser les métaphores extraites des œuvres, et de les interpréter dans le contexte moralisateur et religieux propre à l’époque en question. De plus, je souhaite aussi étudier comment ces métaphores contribuent à la cohérence du discours sur l’amour-propre afin d’en relever des traits généraux.

 

Bi Yanjing,
Université de Bourgogne, France

« Étude contrastive de propriétés caractérisant les constructions figées en français et en chinois »

Longtemps marginalisé en sciences du langage, « comme un épiphénomène assimilé à un ensemble de curiosités appréhendées comme autant d’exceptions aux règles de la langue et du bon usage » (Perrin 2013 : 3), le figement linguistique bénéficie d’un vif intérêt depuis la seconde moitié du XXe siècle, pour plusieurs raisons, et il est devenu depuis l’objet de nombreuses études théoriques et empiriques (Mejri 2002 : 213 ; Mejri 2008), voire un « phénomène central du langage » au sens qualitatif comme au sens quantitatif (Lamiroy 2008 : 89). En France comme en Chine, de nombreux travaux « alliant rigueur scientifique et recherche empirique » (Raymond J.-R. ; Chen Xiangrong : 2015) ont été menés dans ce domaine (J.-C. Anscombre, F. Sabban, M. Gross, P. Blumenthal, Wu et Ma, G. Gross, S. Mejri, I. Mel’čuk, Zhu, etc).

Les nombreuses recherches portant sur le figement, la terminologie correspondante, le classement opéré et les critères définitoires, tous ces paramètres convergeant vers une meilleure compréhension dudit phénomène. Force est donc de constater que les différentes dimensions sont étroitement liées les unes aux autres : les critères de classement président au classement lui-même qui, à son tour, détermine la terminologie employée. Nous nous proposons un poste d’observation nouveau : étudier la notion de figement au sein de deux langues très éloignées l’une de l’autre, typologiquement foncièrement différentes, le français et le chinois. La question sera de connaître la nature des critères qui rapprochent et / ou séparent les deux langues en question. Cette communication se propose donc d’ouvrir un nouveau chantier en matière d’études des figements en opposant deux systèmes linguistiques typologiquement et structurellement différents.

 

Bidaud Samuel,
Université Palacký d’Olomouc, Tchéquie

« L’infinitif en français : de la langue au discours »

Notre communication a pour but d’étudier les emplois de l’infinitif en français. On observe au niveau du discours une grande variété d’emplois de l’infinitif : l’infinitif peut non seulement faire partie de périphrases verbales (« Je dois venir »), mais également avoir une valeur impérative, positive (« À consommer de préférence avant la fin du mois ») ou négative (« Ne pas jeter »), avoir une valeur auto-exhortative (valeur qui n’a jusqu’à maintenant guère retenu l’attention des linguistes mais qui est pleinement attestée : « Vite, voir ce qui se passe ! » (Hergé, Coke en stock)), avoir une valeur narrative (« Et tous d’applaudir à cette déclaration farfelue »), avoir une valeur verbale dans des structures nominales (« Pascal blâme le parler de soi chez Montaigne, mais n’est jamais si grand que quand lui-même y cède » (Gide, Un esprit non prévenu)), ou avoir une valeur purement nominale (« le boire », « le manger »). On peut se demander, devant une telle variété d’emplois, s’il est possible de dégager une valeur unique en langue de l’infinitif, de laquelle découleraient les effets de sens multiples du discours. On aura reconnu, derrière cette hypothèse, le cadre psychomécanique dans lequel se situera notre étude. Pour une partie des linguistes d’inspiration guillaumienne en effet, une même forme grammaticale a en langue un signifié unique, le signifié de puissance, lequel est conçu comme un mouvement de pensée. Faire l’hypothèse d’un signifié unique pour l’infinitif, c’est donc faire l’hypothèse que l’ensemble des emplois de l’infinitif en discours peuvent être rattachés à la fois à la valeur virtuelle de l’infinitif et/ou à sa position chronogénétique.

 

Bikić-Carić Gorana,
Université de Zagreb, Croatie

« La conceptualisation à l’intérieur du groupe nominal (les cas croates et leurs équivalents en français) »

Dans cet article nous voudrions comparer le croate et le français en analysant les relations qui se forment entre le nom comme noyau et les autres éléments du groupe nominal.

D’après la linguistique cognitive, tout concept qui découpe la réalité telle que nous en faisons l’expérience, en plusieurs tranches, constitue une catégorie conceptuelle (Delbecque 2010 : 34). Une fois inscrites dans une langue, les catégories conceptuelles deviennent des catégories linguistiques (lexicales ou grammaticales). Les catégories conceptuelles structurent notre façon de penser et, dans une certaine mesure, elles diffèrent d’une langue à l’autre. De même, elles peuvent prendre la forme de différentes catégories grammaticales dans deux langues comme le français et le croate. Il s’en suit qu’il existe des différences entre le français et le croate non seulement dans l’expression morphosyntaxique de la détermination du nom, mais aussi dans l’importance accordée aux possibles relations exprimées entre le nom et son contexte. Ces concepts peuvent prendre la forme, entre autre, d’adjectifs, de compléments prépositionnels, ou de noms non introduits par la préposition. Notre but est de présenter les catégories conceptuelles exprimées par les cas (régimes ou indépendants) en croate et de les comparer avec leurs expressions en français. Nous nous servirons des analyses du groupe nominal en croate dans le cadre de la linguistique cognitive (Belaj, Tanacković Faletar 2014 et Silić, Pranjković 2007). Nous croyons que cette comparaison fera ressortir non seulement des équivalents intéressants entre les deux langues, mais aussi des différences dans la focalisation à l’intérieur du groupe nominal.

 

Bougchiche Redouane,
Université de Bourgogne, France

« Apprentissage et création linguistiques : comment le locuteur produit-il dans la langue ? »

La productivité est une tâche centrale de la linguistique (Lavie, 2003), surtout lorsqu’il s’agit d’observer et de comprendre comment le locuteur construit sa langue de part les stratégies et les processus cognitifs engagés à cet effet. Cette contribution propose d’aborder l’un des mécanismes cognitifs agissant sur l’appropriation et la productivité dans les langues : l’analogie (Saussure, 1916 ; Bloomfield, 1933). Notre approche vise une interprétation de la productivité et de la manière dont les unités linguistiques sont réalisées en dehors de la théorie générative d’acquisition/apprentissage des langues, en se focalisant essentiellement sur l’acte de langage. Dans une situation hic et nunc, le locuteur ignorant une forme linguistique procède au calcul d’une quatrième proportionnelle afin de répondre au manque de savoirs linguistiques et de produire dans la langue, ici le français, en se basant sur des similarités entre les éléments de l’équation. Ces productions sont des créations analogiques qui appartiennent d’abord à la parole (Saussure, 1916). L’apprentissage et la productivité linguistiques se trouvent ainsi renforcées par ce mécanisme cognitif. L’étude de l’analogie discursive met le locuteur au centre de la production linguistique en situation et en interaction avec autrui.