Recueil des résumés – Section Littérature

Veronica NTOUMOS

Université Saints Cyrille et Méthode – Faculté de philologie « Blaze Koneski »

Skopje – R. de Macédoine

Histoire subjective ou subjectivité de l’histoire dans les œuvres de Tran Thi Hao et d’Anna Moï

Cette contribution a vocation à interroger la subjectivité dans sa dimension éthique au sein des œuvres de littératures francophones asiatiques. En filigrane à la question d’historicité, la subjectivité interrogée se fera l’écho d’une esthétique historique issue d’un orientalisme ayant fait le choix de dessiner le contour de son identité littéraire par la langue française. Si comme le souligne Adorno, il est incapable de penser un déploiement de la subjectivité indépendamment d’une historicité, les œuvres des auteurs vietnamiens Anna Moï et Tran Thi Hao configurent des mises en scène singulières d’une conscience du passé sous le prisme d’un regard émanant de l’intérieur.

Bien trop souvent oubliées des anthologies francophones, ces littératures francophones asiatiques font entendre leur voix – qui ne résonnent plus du centre de la Métropole – mais prennent la parole dans la langue du colonisateur et dévoilent un passé, une mémoire, une histoire qui ont façonné une conscience affective fragmentée. Vecteurs d’un affect aux horizons pluriels, les œuvres analysées, « La jeune fille et la guerre » de Tran Thi hao et « Riz noir » d’Anna Moï convient le lecteur à partir sur la route de la « soie » dans une version « retissée » par les écrivains francophones asiatiques. Cette revisite de l’histoire « en marge » invite à une conversion du regard : il ne s’agit plus de focalisation externe mais d’une véritable plongée dans une identité affective en filigrane à une histoire repensée et réécrite en langue française.




Tanja PETROV

Paris IV – Paris Sorbonne

La subjectivité par le choix de l’action

La passion comme « inclinaison vers un objet que l’on poursuit, auquel on s’attache de toutes ses forces » peut se manifester également envers une personne, une activité, une valeur… pour devenir associée à la conscience de soi, à ce qui guide les choix, oriente les valeurs, enthousiasme l’auteur.

D’après Henri Ey « être conscient c’est […] disposer d’un modèle personnel de son monde » puisque tout ce qui est fait découle de la conscience du monde intérieur déjà construit et qui alors influence les actions à l’extérieur.

« Seul un intérêt passionné peut vouer le sujet à exister pleinement c’est-à-dire à pénétrer son existence par la conscience. » Vivre une vie consciente, c’est aussi faire ses choix, exprimer sa personnalité, ses envies. Si Hadrien a pu, sous la plume de Yourcenar, mener une vie de bâtisseur, d’architecte ou être un empereur promulguant une politique de paix, c’est aussi parce que la paix était plus qu’une notion abstraite, c’était une valeur personnelle prioritaire qui le place dans une position hautement humaniste pour ne pas dire humanitaire.

En vue de montrer que la passion et la conscience de soi se manifestent notamment à travers les choix effectués y compris celui d’exprimer le soi par écrit, il est possible de s’attacher à illustrer pour Hadrien le choix d’un lieu particulier, le choix de voyager, les actions effectuées, la manière d’œuvrer pour la paix.




Bruno RIBEIRO DE LIMA

Université Paris VIII

Poétique et transsubjectivité de « Les ravagés », Henri Michaux

Le texte « Les ravagés » nous est présenté comme étant des « pages venues en considérant des peintures d’aliénés »[1]. Face à ce double processus de création – l’écriture faisant naître des tableaux inexistants au sens empirique du terme – nous voudrions présenter une analyse du processus d’instauration d’une transsubjectivité spécifique à cette œuvre d’Henri Michaux. Le concept de transsubjectivité, à la suite d’Henri Meschonnic, sera utilisé dans le sens développé par Gérard Dessons, qui est ce de l’art transformant l’individu auteur en sujet et l’individu lecteur en sujet, c’est-à-dire que nous sommes face à une double « rencontre de subjectivités, que la subjectivité se constitue dans cette rencontre »[2]. D’où la nécessité d’inscrire notre proposition dans l’axe « littérature » tout en gardant une approche aussi linguistique, car toute analyse littéraire révèle précisément une conception du langage, de l’homme et de la société.

Notre démarche étant poétique (Henri Meschonnic), nous allons voir que, « Les ravagés », à partir de l’analyse focalisé notamment sur les déictiques de ce texte, fait la critique de la représentation, critique du langage en tant qu’outil (Benveniste). Si le discours est le lieu où la subjectivité est maximale, car sa finalité est sa propre invention, le poème « Les ravagés » invente le voir, en même temps qu’il invente – qu’il fait entendre – le dire, la voix de ces peintures, et de ces « sujets de l’art ».